Communauté de Paroisses St. Gabriel Val de Sarre Nord

 

 

 

 

La Croix Glorieuse : vers le salut

Le 14 septembre, l’Église fête la Croix Glorieuse. Le point commun des lectures de cette fête, c’est le serpent ; celui en bronze de l’Ancien Testament. Un commentaire des textes de la Croix Glorieuse, par le Père Marcel Domergue : Nombres 21,4b-9 ou Philippiens 2, 6-11, Psaume 77, Jean 3 13-17.

Un symbole fort que ce serpent de bronze. En effet, dans le langage des figures bibliques, le serpent est l'image du mal. En Genèse 3, il représente la tentation. Au livre des Nombres, les serpents qui déciment les Hébreux sont en quelque sorte la représentation extérieure, la projection, du mal intérieur qui détruit le peuple : le mal du doute. Soumis à la privation au cours de leur traversée du désert, les Israélites se demandent si Dieu est vraiment avec eux et si leur libération de l'Égypte n'était pas un piège. Sur l'ordre de Dieu, Moïse élève sur une perche, aux yeux de tous, un serpent de bronze, image de leur mal. Tous ceux qui, mordus, tournent les yeux vers lui sont guéris (Nombres 21, 4-9). Magie, superstition ? Non, symbole : regarder notre mal en face, le reconnaître, ne pas le gommer ou l'occulter est le commencement du salut. Sagesse 16, 3-7 commente : « Ils périssaient sous la morsure de serpents tortueux, (...) et ils eurent un signe de salut (...) celui qui se tournait vers ce signe était sauvé, non pas par l'objet qu'il voyait, mais par toi le Sauveur de tous ».

Le Christ serpent

Dans la 3e lecture, Jésus s'assimile au serpent de bronze « élevé dans le désert ». Portons d'abord notre attention sur le mot «élevé». Chaque fois que saint Jean l'emploie, il superpose l'image de la croix du Christ «élevé» au-dessus de terre, et celle du serpent au désert. Par exemple, en 12, 32 : « Pour moi, dit Jésus, une fois élevé de terre, j'attirerai à moi tous les hommes. » Lisons surtout Jean19, 37 : « Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé », qui renvoie à Zacharie 12, 10, texte qui fait aussi allusion au serpent d'airain. Pour Jean, la croix est une « élévation » pour que Jésus devienne le centre de convergence de tous les regards. Cette élévation est aussi une exaltation : Jésus est élevé jusqu'à la gloire de Dieu. En attendant, l'image se charge de tout ce qu'il y avait dans le symbole du serpent de bronze : Jésus affiche devant nous la figure de notre mal. Paul dira : « Il s'est fait péché », et même : « Il s'est fait malédiction ». Là vient confluer une autre image, présente aussi chez saint Jean : celle du serviteur frappé par notre péché, porteur de notre mal. En Isaïe 53, 1-5, le serviteur est aussi « élevé » ; il porte nos souffrances et notre péché : c'est par ses plaies que nous sommes guéris.

Accepter cette lumière

La suite de la 3e lecture dit que le Christ est venu non pas juger mais sauver. Celui qui regarde vers lui, qui croit en lui, échappe au jugement. Mais beaucoup d'hommes préfèrent ne pas « regarder » : ils choisissent les ténèbres, et non la lumière que répand Jésus sur sa croix pour ceux qui acceptent de voir ce que cela signifie. Se tourner vers le Christ crucifié, aujourd'hui, cela signifie ne pas fermer les yeux devant tous les hommes assassinés que les médias «élèvent» à nos regards, ne pas détourner la tête devant les exclus éliminés de la terre des hommes et des biens qu'elle donne. Superposer à l'image du Christ crucifié celle de tous ceux qui meurent, même quand c'est par leur faute. Ils sont eux aussi porteurs de notre mal ; de notre égoïsme, de notre indifférence, de notre inattention. Il ne suffit pas de quelque émotion passagère : regarder ceux que nous avons transpercés signifie en faire notre affaire. Faire nôtre le problème. Le problème ? Le drame plutôt. C'est là que nous pourrons trouver le Christ, et pas ailleurs.