Il y a les voyants, ceux dont le regard éclaire l’invisible par leur bonté. Il y a les voyeurs, ceux qui guettent les multiples travers de leurs semblables et se complaisent à les révéler aux autres.

Il y a ceux qui tâtonnent pour avancer, la vue basse, mais dont le cœur sait reconnaître la justesse du ton, la bonté cachée derrière une rudesse pudique, le feu sous la cendre. Il y a les justiciers qui revendiquent la transparence, l’exactitude, et le pouvoir que donne la vue.

Il y a ceux qui accusent, les donneurs de leçon, les esprits faux, qui s’effondreraient, si on leur donnait ne serait-ce qu’une paille à porter. Il y a ceux qui préfèrent l’ombre à la lumière, pour se cacher car ils croulent sous la honte, et leur poutre est trop lourde à porter.

Nous sommes de tous les camps bien sûr, et c’est en nous que passe le fer de la parole évangélique. Car toi seul, Seigneur, vois clair en nous.

« Que veux-tu que je fasse pour toi ? » (*) demandes-tu à l’aveugle, comme si cela n’allait pas de soi.

« Seigneur, fais que je vois ! ». Ne crains pas de mettre de la boue sur mes yeux, de la nuit sur ma nuit, pour déchirer le voile qui enferme mon cœur.

Fais que je vois comme toi tu vois.

Fais que je pleure pour voir plus clair.

Fais que mon cœur saigne quand l’autre souffre silencieusement du dedans.

Fais que je vois ton temple dans le corps de mon frère.

Fais que je vois frémir le ciel entier devant un homme à terre.

Fais que je regarde sans honte ni trouble au visage la croix où tu t’offres.

Fais que je vois le tombeau vide.

* Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc, chapitre 18, versets 35-43

Extrait de Signes dans la Bible (2015-2016)