Nous marchons dans la nuit, portant les aromates. Le jour va se lever, la nuit est encore profonde. Cette nuit semble durer depuis la mort de Jésus, à elle seule, elle englobe toutes les nuits du monde.

Nous marchons par fidélité, car on ne peut abandonner à la nuit du tombeau celui qu’on aime.

Nous marchons par détermination, car si nous défaillons, c’est la haine qui aura le dernier mot.

Nous marchons par amour, car nous, les pécheresses pardonnées, et nous, les sans-histoires, nous, les prophétesses, et nous, les silencieuses, il nous a regardées comme personne, il nous a livré les paroles de la vie éternelle, il est venu dans notre nuit pour nous ouvrir un chemin de lumière.

Lève-toi, ma sœur, mon frère. Lève-toi et marche avec nous ! L’aube se lève, la pierre roule, une voix clame : « Vous cherchez Jésus le crucifié. Il n’est pas ici, Il est ressuscité, comme il l’avait dit ! »*

Dans cette nuit très sainte, tu as entendu cette voix, ma sœur, mon frère. Tu as été saisi par la parole puissante de Jésus et tu l’as suivi sur les routes poussiéreuses de nos pérégrinations. Tu as tant abandonné, et tu as trouvé une liberté et une paix que le monde ne pouvait pas te donner. Il a fallu aussi, ô, ma sœur, ô, mon frère, te tenir debout dans la flamme de la Passion, les yeux rivés sur le bien-Aimé crucifié, tout près de Marie, sa mère. Tu as marché avec nous dans cette longue nuit pour que la lumière du Ressuscité te saisisse !

Et même si vous n’avez rien fait de tout cela, lève-toi, ma sœur, mon frère, que rien n’arrête ta course légère : ni les erreurs du passé, ni les angoisses de l’avenir, ni les soucis du présent. Un jour nouveau, éternellement nouveau se lève – le Ressuscité est ce jour. Il est ta vie, il est ta destinée, il est le mystère ultime de ton être. Il te saisit, et résonnent à tes oreilles ses paroles de la joie pascale : « Ne craignez point ! Allez dans le monde entier, proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création ! »**

Marchons dans le matin du monde, portant dans nos vases fragiles les précieux aromates de la Bonne Nouvelle !

 Frère Pavel Syssoev

* Évangile selon saint Matthieu, ch. 28, v. 5-6.

** Évangile selon saint Marc, ch. 16, v. 15.